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MINISTÈRE DE L'AGRICULTURE
Monsieur Simon LAPORTE
Conseiller « Économie et suivi des Filères Alimentaires »
au cabinet de monsieur le ministre Marc FESNEAU
 
Le 28 novembre 2023




Monsieur le conseiller.
 
Nous tenons à vous remercier à nouveau vivement pour le premier entretien (de 3 heures !) que vous nous avez accordé, avec beaucoup d’attention, le 14 septembre dernier, en prolongement de celui que nous avions eu le 17 juillet avec monsieur Mathias GINET conseiller technique « agriculture » auprès de madame la Première ministre et monsieur le président de la République.
 
Les dix participants, dont les membres de notre groupe de scientifiques du CNRS, de l'INRAE, et de l’INSERM, qui soutiennent, comme déjà plus de 41 000 citoyens, les objectifs du manifeste d'OASIS RÉUNION, sont très satisfaits de son déroulement et de leur participation, ainsi que de votre volonté exprimée d'aller plus loin ensemble.
 
Nous avons pu en effet vous présenter l’organisation et les objectifs du Collectif OASIS RÉUNION qui œuvre depuis 2017 :
► pour une agriculture « 0% produits chimiques - 100% locale, biologique, et paysanne »,
► pour « une sécurité et une qualité alimentaires durables à La Réunion » via des scénarios visant « l’autonomie–autosuffisance alimentaire durable » dont nous vous préciserons bientôt davantage comment cet objectif peut être atteint sur toute l'île avec même des focus au niveau de ses différentes régions. 
Étude conduite par Josette GARNIER et Gilles BILLEN, tous deux directeurs de recherche au CNRS, dont vous pouvez lire la synthèse en cinq pages ici.
 
Vous pouvez également prendre connaissance de leurs travaux étayés par un voyage d'étude sur l'île en avril-mai 2022, en lisant ici un document de synthèse en quatre pages d’un dossier de quatre-vingts pages accessible ici.
 
Vous nous avez rappelé qu'il y avait déjà sur l'île des organismes tels que la Chambre d’Agriculture, la DAAF, et surtout la Commission Agriculture du Conseil Départemental, qui, au travers principalement du « PLAN AGRIPÉI 2030 » oeuvrent entre autres pour la « souveraineté alimentaire » de l'île (toutefois au sens le plus restrictif, voir plus loin). Nous profitons de la présente pour vous apporter la réponse suivante que nous n’avons pas eu le temps de développer :
 
« Nous sommes bien sûr en relation avec ces organismes, et avons étudié, comme il se doit, l’important document PLAN AGRIPÉI 2030. Toutefois, nous vous rappelons qu’il a été élaboré, très sérieusement certes, mais en 2017 et 2018, soit avant les différentes crises sanitaire et géopolitique–énergétique qui ont secoué et secouent toujours le monde entier dont, évidemment, La Réunion, en complément avec les effets du réchauffement climatique qui se font déjà sentir fortement sur l'île.
 
Nous vous précisons également que de ce fait principalement, les dispositions prises par ce plan ne sont ni assez rapides ni assez intenses. Il est pourtant censé prendre en compte le « zéro polluant agricole » de la Trajectoire outre-mer 5.0 lancée par la Ministre des outre-mer en avril 2019.
 
TRAJECTOIRE OUTRE-MER 5.0
À ce sujet, il serait très utile, voire indispensable, de faire un premier bilan du PLAN AGRIPÉI 2030 après cinq années d’application… En mentionnant par exemple, que la restauration collective biologique imposée par la Loi ÉGAlim n’est qu’à 0,84 % sur l'île et à moins de 1‰ en bio et local ! (source : Chiffres AGRESTE publiés par la DAAF RÉUNION) alors que le PLAN AGRIPÉI 2030 visait quant à lui 10% au 01/01/2020.
 
Nous sommes donc encore très loin des objectifs de la Loi, même minorés à 5% pour l'outre-mer au lieu des 20% au 01/01/2020 votés pour la métropole.
 
Et il en va, hélas, pareillement du récent Plan Régional de la Souveraineté Alimentaire (PRSA) présenté en octobre dernier par monsieur le Préfet (voir ici) qui va pourtant dans la bonne direction. Ce plan en effet, élaboré sérieusement par les pouvoirs publics avec les représentants des professionnels, mais sans la participation citoyenne des consommateurs, ne vise qu’une augmentation de « 9 points » des fruits et légumes frais, et de « 2 à 3 points » de la viande, du lait, et des œufs produits localement. (Voir tableau ci-dessous). Ceci, à l’horizon 2030, risque fort de ne pas améliorer du tout le pourcentage d’importation de denrées alimentaires, actuellement de 80 %, au motif que la population réunionnaise pourrait passer dans le même temps à un chiffre très proche du million de consommateurs réunionnais, touristes inclus. (progression de 0,4/0,5 % par an selon l'INSEE).
 
TABLEAU DES OBJECTIFS DU PRSA
(PLAN RÉGIONAL DE SOUVERAINETÉ ALIMENTAIRE)
 
Nos commentaires : Résultats qui conduisent à un statu quo, au meilleur des cas, c'est-à-dire si les objectifs énoncés étaient bien atteints avec de surcroît des méthodes restant très agro-pétro-chimiques donc polluantes et dépendantes des importations.
 
Ce qui est malheureusement le cas aussi du « Plan tonnage de la canne » qui va très fortement et délibérément (!) vers le quantitatif, accentuant la pollution pétrochimique plutôt que d'aller vers les objectifs de qualité et de diversification tels que nous les préconisons depuis 2017 afin d'être beaucoup plus « durables », « rentables », et « désirables » pour les jeunes générations dont l'Agriculture réunionnaise a « intensément » besoin.
 
QUESTION :
 
Quel taux de couverture réelle avons-nous déjà atteint sur les 600 000 tonnes (selon OASIS RÉUNION et 770 000 tonnes selon l'ADEME) de nourriture consommée chaque année par les 865 000 Réunionnais auxquels s’additionnent les 40 à 50 000 touristes présents en rotation mais en permanence sur l'île ? 
 
RÉPONSE :
 
D'après les chiffres officiels il ne s'agit que de 20% soit 121 000 Tonnes, ce qui corrobore le taux de 80% d'importation alimentaire dont nous faisons état régulièrement dans nos interventions, exposés et interviews, par souci d'authenticité et pour une plus grande prise de conscience de toute la société réunionnaise qui n'entend régulièrement parler que de 70% de couverture en fruits et légumes frais... trop facilement assimilable dans son esprit à un pourcentage d'autonomie alimentaire globale.
 
Voici le tableau détaillé par grandes filières :
Nous pensons, comme nous vous l'avons précédemment exprimé, qu'il conviendrait d'élaborer, avec toutes les parties concernées, un Plan Stratégique Global (PSG) permettant de répondre de façon appropriée aux enjeux actuels. Il nous faut rappeler ici qu'il va falloir se préoccuper d'urgence et de façon adéquate de la crise agricole qui est en train de s'intensifier sur l'île (où on ne compte que moins d'1 agriculteur pour 100 habitants, contre le double en métropole, sur une surface de 370 m2 de terre agricole par habitant soit environ dix fois moins qu'en métropole), avec :
 
• la grande difficulté d'accéder au financement des terres cultivables toujours bloquées par des phénomènes spéculatifs.
 
• un problème de continuité des exploitations : 55% des agriculteurs ont plus de 50 ans.
 
• le manque de valorisation, de formation et d'accessibilité du métier d'agriculteur (voir en pied de courriel notre document sommaire « Les 3 priorités pour l'agriculteur et les espaces agricoles »). Il y a des attentes inacceptables allant jusqu'à un an pour certaines formations agricoles.
 
• une prise en compte de la situation de grande difficulté dans laquelle se trouve l'agriculture biologique qui, compte tenu d'un contexte inflationniste très fort et de la concurrence déloyale faite par le label HVE, est passée depuis 2022 de +15% de croissance à -5% de récession.
 
Quarante institutionnels ont déjà donné leur accord de principe pour se réunir autour d'une table, y compris l'actuel Président du Conseil Départemental (voir le « Consensus Territorial Réunionnais » ci-dessous).
 
 
Nous allons bien sûr y revenir ensemble lors d'un souhaitable deuxième entretien à prévoir avec vous, si possible dans la première quinzaine de décembre, et aussi avec Monsieur le Préfet de La Réunion que le chef de cabinet de Madame la Première Ministre nous incite à rencontrer utilement -  certainement avant la fin de l'année - avec Monsieur le Directeur de la DAAF. Nous leur écrivons en ce sens cette semaine, avec transmission à toutes fins utiles de ce présent courriel qui les concerne également.
 
QUESTION :
 
À ce sujet, quelles date et heure pouvez-vous nous proposer pour si possible 90 minutes d’entretien ? Serait-ce envisageable pour vous entre le 11 et le 20 décembre, de préférence à 14h ou à 15h (Heure de Paris) ? 
 
Par ailleurs : 
Nous avons eu l’opportunité de vous expliquer pourquoi nous utilisons volontairement les deux qualificatifs « autonomie » et « autosuffisance », car ils ne sont pas synonymes mais complémentaires – voir notre document « Sécurité et qualité alimentaires durables de La Réunion » ici. Il est à noter que l’appellation « souveraineté alimentaire » est censée introduire une notion supplémentaire très importante au niveau de la gouvernance : la légitimité des citoyens consommateurs à exprimer leur choix en matière de qualité d’alimentation, réellement accessible à tout le monde. Cette notion pourrait bien sûr venir s'ajouter pour viser « l'autonomie, l'autosuffisance, et la souveraineté alimentaires durables » et faire l'objet d'une planification agricole gouvernementale d'AVENIR très volontariste (ce qui n'a pas été le cas - hélas - dans l'élaboration récente du PRSA Plan Régional de Souveraienté Alimentaire de La Réunion) dont il a été question plus haut.
 
À ce sujet, vous avez dû être frappé (pour ne pas dire choqué) tout comme nous, par le chiffre de 10 000 milliards de dollars qui vient d'être publié par la FAO le 6 novembre dans son rapport annuel 2023 : Les coûts cachés des systèmes agroalimentaires représentent au moins 10 000 milliards d’USD au niveau mondial (lire ici). 
 
A titre d'exemple rappelons que le coût de la seule dépollution de l'eau, des nitrates et des pesticides, atteint entre 54 et 91 milliards d'euros (selon les éléments pris en compte) en fonds publics pour la France chaque année.
 
La bonne nouvelle en faveur de la Transition agro-bio-écologique, c'est que la résorption de telles sommes permettrait de financer largement un accompagnement approprié des agriculteurs en faveur d'un changement global de modèle agricole faisant de La Réunion un laboratoire également utile à l'outre-mer, à la France métropolitaine, aux pays de l'Union européenne, et in fine à tous les pays de l'ONU qui sont tenus de faire respecter le Droit Humain à l'Alimentation qui est hélas un des Droits de l'Homme les plus bafoués sur la planète. 
 
Voir le Rapport de l'IPES-FOOD (dont le co-président Olivier De Schutter est membre du comité de soutien à OASIS RÉUNION, lire son texte ici) : « De l'assiette à la Planète » : L'alimentation, moteur de l'action climatique des collectivités locales 
   (Rapport intégral ici 
   (Résumé ici 
qui traite du Sommet de New-York (2021) sur les systèmes alimentaires co-organisé par le secrétariat général des Nations Unies et le Forum économique mondial, un consortium de grandes entreprises multinationales participant chaque année au Forum international de Davos.
Les critiques sur ce Sommet continuent malheureusement à dénoncer que, comme auparavant, les discours ne sont toujours pas suivis d'effets.
Nos conclusions :
Ce que l’on peut tirer provisoirement de ces deux rapports, c’est que le Sommet sur les systèmes alimentaires qui devait les transformer pour contribuer à la construction d’un « monde plus juste dans lequel personne n'est laissé de côté » n’a guère eu d’impact réel sur le terrain.
Donc, deux ans après le Sommet sur les systèmes alimentaires : beaucoup de rhétorique et de réunions, très peu de résultats tangibles.
 
Ainsi que vous pourrez le constater, nous mettons nous aussi en avant, à l'attention de toute la société, les 7 avantages du « cercle vertueux de l'Agriculture Biologique et régénérative » qui détaille « EN MANGEANT 100% LOCAL & BIO J'AGIS SUR... » mais avec une vraie volonté collective d'atteindre une concrétisation effective.
Voir notre affiche en pied de ce courriel.
 
Vous trouverez ci-après les résumés des contenus des textes de chacun des intervenants scientifiques, tous à la pointe, au niveau international, de la Transition agroécologique et tous membres du comité de soutien au manifeste d'OASIS RÉUNION, lors de notre réunion en visioconférence du 14 septembre dernier :
 
► Gilles BILLEN, et Josette GARNIER, Directeurs de recherche au CNRS, Sorbonne Université, UMR Metis : « L’autosuffisance alimentaire est-elle possible à La Réunion ? ». ici.
 
► Denis LAIRON, Directeur de recherche à l'INSERM, Nutritionniste, Membre du Programme « Systèmes Alimentaires Durables » de l’ONU : « À La Réunion, comme partout ailleurs, une transition alimentaire et écologique est indispensable ... et possible ». ici.
 
► Michel DURU, Directeur de recherche, actuellement chargé de mission à l’INRAE : « À La Réunion comme dans tous les pays européens, l'agriculture et l'alimentation génèrent des coûts cachés estimés au minimum à l'équivalent des coûts de l'alimentation ». ici.
 
ainsi que leurs textes de soutien au Manifeste d'OASIS RÉUNION en ligne ici.
 
Egalement en lien les plus récents et principaux autres textes de soutien à OASIS RÉUNION, de :
 
► Philippe CAMBURET, Président de la FNAB (Fédération Nationale d’Agriculture Biologique) : « La Réunion : un besoin vital de réorienter l'agriculture locale » ici.
 
► Philippe POINTEREAU, Agronome, Membre fondateur de SOLAGRO et co-scénariste du scénario Afterres 2050 : « Passer du système agricole au système alimentaire » ici.
 
De même vous trouverez :
1° - ci-dessous le tract de notre vaste campagne de communication grand public : « MANGER, UNE PRIORITÉ VITALE ! » dont déjà 20 000 exemplaires sont en cours de distribution sur l'île, avec un objectif total de 100 000 exemplaires diffusés sur les 24 communes. Ceci pour encore mieux répondre à notre volonté que tous les citoyens aillent, en conscience, vers un mode de consommation plus « consom'action » c'est-à-dire plus « éco-responsable » : éco-logiquement et éco-nomiquement responsable.
2° - au lien ci-après la présentation de la plainte que nous soutenons, déposée par la coalition Secrets Toxiques auprès de la Cour de Justice de l’Union Européenne, suite au renouvellement pour 10 ans de l’utilisation du glyphosate que nous considérons comme illégal  - lite ici.  
 
Monsieur le conseiller, comme vous l'aviez souligné, nous nous efforçons au travers d'OASIS RÉUNION d'avoir une prise de conscience GLOBALE et aussi approfondie que possible, pour nous consacrer à des ACTIONS CITOYENNES LOCALES aussi cohérentes, efficaces et durables que possible, ce qui nous pousse à rester, en toute circonstance, dans un esprit constructif de dialogue, d'ouverture, et bien sûr d'humanisme.
 
Encore merci pour votre écoute sur des enjeux primordiaux car vitaux, et à bientôt - nous l'espérons - pour notre deuxième entretien en visioconférence.
 
Recevez entre-temps, monsieur le conseiller, l’expression de notre attentive et cordiale considération.
 
Pour le comité de pilotage :
Bernard Astruc - Yvette Duchemann - Stéphane Le Duff - Marie-Claire Duchemann Vizier - Bernard Padé
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Collectif citoyen Oasis Réunion
https://oasis-reunion.bio
https://www.facebook.com/oasis.reunion.bio/
 
« Ne doutez jamais qu'un petit groupe de gens réfléchis et engagés puisse changer le monde. En fait, c'est toujours comme cela que ça s'est passé. »
   Margaret Mead (anthropologue, 1901-1978)
 
 
« Il est possible de nourrir La Réunion en se passant des pesticides et des engrais de synthèse. On préserve ainsi les ressources en eau et la biodiversité, tout en émettant moins de gaz à effet de serre. » 
Gilles Billen, directeur de recherche émérite au Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)
 
 
CAMPAGNE DE COMMUNICATION DU COLLECTIF OASIS RÉUNION :
 
« MANGER, UNE PRIORITÉ VITALE ! »
 
Ce document recto-verso déjà tiré à 20 000 exemplaires est en cours de diffusion dans les 24 communes de l'île..
 
Recto :
 
 
 
 
Verso :
 
 
 
 
 
« Nous sommes ce que nous mangeons »
 
 
 
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